Pierre Cartellier (1757-1831)
Louis XV au galop
1817
Maquette en terre cuite patinée, premier projet
(Petits accidents)
H. 36 x L. 32 x P. 14 cm
Provenance : Pierre Cartellier, par descendance
Estimate : 80.000 / 100.000 €
Hammer Price :
N° de lot : 144
- Gérard Hubert, Pierre Cartellier, statuaire. Oeuvres et documents inédits. Ancien Régime, Révolution et Consulat, année 1976, pp. 313 et suiv.
Oeuvres en rapport :
– Pierre Cartellier, Louis XV au pas, deuxième projet maquette en cire deuxième projet maquette en cire, 1825, H. 19 cm, noté comme conservé dans une collection privée dans l’Essai de Catalogue raisonné, n° 37, p. 29 ;
– Pierre Cartellier, Louis-Messidor Petitot, Charles Crozatier, Louis XIV, 1835, statuette en bronze patiné, H. 139 cm, Château de Versailles, n° inv.MV 6880 ;
– Pierre Cartellier, Louis Petitot, Statue équestre de Louis XIV, bronze, fonte de Crozatier entre 1831 et 1834, place d’Armes du Château de Versailles.
Cette œuvre originale témoigne de l’évolution d’un des plus grands projets de monument commandés sous la Restauration. La maquette en terre cuite, très aboutie et réalisée en 1817 correspond au premier projet par le sculpteur Pierre Cartellier pour répondre à la commande faite par le roi Louis XVIII d’une statue équestre monumentale en l’honneur de son aïeul, le roi Louis XV pour la place Louis XV (aujourd’hui Place de la Concorde).
L’artiste, introduit par Vivant Denon s’était affiché comme l’un des sculpteurs officiels de la famille impériale. Il poursuit sa carrière sans difficultés sous la Restauration, sachant s’adapter aux changements politiques et fort de sa réputation bien implantée. Outre sa distinction de chevalier de l’ordre de la légion d’honneur depuis 1808, sa nomination à l’académie des Beaux-Arts en 1810 et celle, en 1816, de professeur à l’École des Beaux-arts de Paris assurent cette influence.
C’est donc vers un sculpteur officiel, émérite et reconnu que se tourne Louis XVIII pour réaliser un monument qui devait célébrer le retour des Bourbons sur le trône de France et établir une continuité dynastique.
Tout en s’inscrivant dans la tradition du portrait équestre royal, symbole de pouvoir remontant à l’Antiquité, Pierre Cartellier choisit une composition à la fois classique et novatrice. Tête laurée, vêtu d’un habit brodé à la française, d’une cuirasse, portant le grand cordon du Saint-Esprit en sautoir et un autre ordre en cravate, une écharpe flottant sur la croupe du cheval, le roi Louis XV est représenté sur un cheval caracolant au-dessus de trophées brisés. Sans doute inspiré de la statue équestre du Bernin, Cartellier a, à l’instar de son rival Bosio qui était chargé de l’exécution de la statue équestre de Louis XIV de la Place des Victoires, représenté le roi en héros victorieux et au galop.
Le monument transcrit dans le marbre devait être achevé à l’occasion d’une inauguration prévue le 4 novembre 1829, mais le projet est rapidement modifié en raison de l’impossibilité de trouver un bloc de marbre de carrare adapté à la hauteur prévue initialement de 525 cm. En 1825, Cartellier propose de réaliser sa statue dans un autre matériau, en bronze. Il doit alors faire évoluer la monture dans l’attitude plus classique d’un cheval au pas en raison des difficultés engendrées par la technique de la fonte. En février 1826, un nouveau petit modèle au quart d’exécution présentant la modification de l’attitude du cheval est achevé (aujourd’hui disparu). Mais pendant ce temps, le roi Charles X confie à un autre sculpteur, Jean-Pierre Cortot, la commande d’une statue de Louis XVI à l’emplacement prévu initialement pour la statue de Louis XV de Cartellier.
Un nouvel emplacement, le Rond-Point des Champs-Élysées, est finalement choisi en 1828, de même qu’un piédestal est commandé à l’architecte Alphonse de Gisors mais décrié par Cartellier. Ce dernier achève le grand modèle en décembre 1829 et son élève Crozatier s’apprête à réaliser la fonte de la sculpture lorsque survient la révolution de Juillet. Cartellier brise hélas son modèle de cavalier déjà avancé ; le cheval, quant à lui, reste dans le moule. Cartellier décède le 12 juin 1831 laissant en suspens son monument.
La commission chargée des monuments inachevés finit de payer le fondeur et confie en 1834 le nouveau modèle du cavalier à Louis-Messidor Petitot, beau-fils de Pierre Cartellier qui a repris les affaires de son feu beau-père. Mais Louis-Philippe, Roi des Français, à l’occasion de la transformation de l’ancienne résidence royale en musée dédié « A toutes les gloires de la France », modifie le projet et demande désormais que l’on réalise un portrait de Louis XIV. Une commande, d’un montant de 12 000 francs est alors passée le 10 mai à Petitot pour la création du modèle en plâtre du nouveau cavalier, l’idée étant de récupérer le cheval inutilisé du projet de 1816 qui était resté dans le moule en 1831.
Un petit modèle du nouveau sujet, à savoir une réduction en bronze réalisé par Crozatier est présenté au Salon de 1836.
La monumentale statue du roi Soleil empanaché installée sur le cheval au pas de Louis XV est finalement installée à la fin de l’année 1836 à l’entrée du Château de Versailles. Elle surplombe depuis 2008 la Place d’Armes.
Notre prestigieuse maquette restée dans la famille de l’artiste jusqu’à ce jour est l’unique témoignage d’un projet grandiose qui a subi les conséquences malheureuses d’une succession d’atermoiements politiques.