Auguste RODIN (1840-1917)
Jeune fille aux fleurs
Vers 1877
Buste en terre cuite signé « A Rodin » au revers.
(petits accidents et petits manques).
H. 50,5 cm
Don d'Auguste Rodin à Charles FEIL (1825-1887) vers 1877 ; Louise FEIL, épouse de Charles PAISSEAU (1850-1919) ; Docteur Georges PAISSEAU (1876-1948) ; Pierre-Henry PAISSEAU (1919-1998) ; par descendance
Estimation : 15.000 / 20.000 €
Prix au marteau : 73.000 €
N° de lot : 107
-Micheline HANOTELLE, Paris-Bruxelles : Autour de RODIN et MEUNIER, Courbevoie, ACR édition, 1997 ;
-June Ellen HARGROVE, Gilles, GRANDJEAN, CARRIER-BELLEUSE, le maître de RODIN, cat. exp., Compiègne, Palais de Compiègne, 22 mai-27 octobre 2014, Paris, RMN, 2014 ;
-Catherine CHEVILLOT, Antoinette Le NORMAND ROMAIN, RODIN, Le Livre du Centenaire, cat. exp., Paris, Grand Palais, 22 mars-31 juillet 2017, Paris, RMN et musée Rodin éd., 2017.
Après sa démobilisation en 1870, Auguste Rodin rejoint son maître Albert-Ernest CARRIER-BELLEUSE (1824-1887) en Belgique. Celui que l’on nomme alors le « Clodion du second Empire » dirige le chantier de la Bourse de Commerce à Bruxelles. À son retour à Paris en 1877, Rodin s’installe dans un atelier rue Lebrun et se lie d’amitié avec son voisin, Charles FEIL (1825-1887). Ce dernier, illustre chimiste verrier, soutient financièrement le jeune sculpteur. En remerciement, Auguste RODIN lui offre ce buste en terre cuite inédit. Selon une habitude instituée tout au long de sa carrière, l’artiste rend hommage à ses défenseurs, ses soutiens aussi bien journalistes, critiques d’art ou hommes politique, en leur faisant dons d’oeuvres de sa main.
Dans les oeuvres de jeunesse de RODIN, l’influence de CARRIER-BELLEUSE qu’Henry NOCQ a décrit comme « l’empreinte (qui) a persisté malgré tout » est visible tant dans la technique que dans son style. On retrouve cette similarité dans ses bustes de Jeune fille, chapeau fleuri de roses (Paris, musée Rodin, inv. S.1056) vers 1864, de Madame CRUCHET de 1868 (Paris, musée Rodin, inv. S. 00191) et de l’Automne ou les Raisins de 1874 (ancienne collection Mathias GINSBACH), dont il pourrait éventuellement être le pendant. Auquel cas, ce buste coiffé de roses pourrait personnifier la saison du Printemps.
Toutefois, si l’empreinte « carrier-belleusienne » est évidente, on voit déjà paraître dans l’inclinaison de la tête, l’asymétrie du drapé et l’expression mélancolique la main si particulière du génie de Meudon. RODIN se sentant redevable d’un contrat tout du moins moral avec CARRIER-BELLEUSE, omet de signer ce buste avant de l’offrir à Charles FEIL. On retrouve dans les archives du musée RODIN une correspondance de Charles PAISSEAU (1850-1919), beau-fils de Charles FEIL de qui il a hérité ce buste . Il s’adresse au sculpteur, alors au faîte de sa gloire, le 27 octobre 1900 : « Je viens vous demander de bien vouloir nous signer cette tête, car nous sommes, les miens et moi des admirateurs passionnés de vos oeuvres. ». La signature apposée au dos du buste est effectivement incisée de la main de Rodin dans la terre déjà cuite. Il a existé, de tradition familiale, une réponse écrite disparue lors de la Seconde Guerre Mondiale, dans laquelle RODIN précise qu’il s’était fait apporter le buste, avait reconnu avec un « plaisir visible son joli modèle » et l’avait signé. Cette terre cuite, inconnue et inédite, vient s’ajouter au rare corpus des oeuvres en terre cuite de jeunesse de RODIN.
