Joseph Bernard (1866-1931)

Jeune fille à la cruche ou Porteuse d’eau

Modèle créé en 1910
Édition de A. A Hébrard entre 1914 et 1934
Bronze à patine nuancée brun-vert
Signé « J Bernard » à l'arrière de la terrasse
Porte le cachet de l'éditeur « Cire perdue/ A.A Hébrard » et le n° 24 à l'arrière de la terrasse
(Petites oxydations et usures à la patine, notamment sur le bras gauche.)

Haut. : 53 cm et Dim. de la base : 2,5 x 12,6 x 15,8 cm

-

Estimation : 12.000 / 15.000 €

Prix au marteau :

N° de lot : 79

Littérature en rapport :- Exposition des œuvres de Joseph Bernard à l'Hôtel de la Revue ' les Arts ', in Les Arts, 1 Août 1914, pp. 16/32 ;
- Luc Benoit, « Joseph Bernard (1866-1931) », in Gazette des Beaux-Arts, 1932, vol. 2, pp. 217-228 ;
- Didier Chautant, Recherches sur la vie et l'œuvre de Joseph Bernard (1866-1931), sculpteur français, thèse de l'école du Louvre dirigée par Jacques Thirion, Paris, 1977 ;
- René Jullian, Joseph Bernard, Éd. Fondation de Coubertin, Saint-Rémy-les-Chevreuses, 1989 ; n° 146, pp. 298-302, notre exemplaire cité p. 298 ;
- Ss. dir. Alice Massé et Sylvie Carlier, Joseph Bernard 1866-1931. De Pierre et de Volupté, cat. Exp. tenue du 18 octobre 2020 au 21 février 2021 au musée Paul-Dini de Villefrance-sur-Saône et du 20 mars au 20 juin 2021 à la Piscine-musée d'art et d'industrie André-Diligent de Roubaix, Édition Snoeck, Gand, 2020 notice rédigée par Valérie Montalbetti : « La Jeune fille à la Cruche », pp. 220-221 ;
- Annick Lemoine et Juliette Singer, Le Paris de la modernité, 1905-1925, cat. Exp. tenu du 14 novembre au 14 avril 1924, Paris, Petit Palais, Édition Paris Musée, 2023, cat. 317 et p.312.

OEuvres en rapport :
– Joseph Bernard, Porteuse d’eau, 1912, bronze, H. 175 cm, signé sur le socle à l’arrière « J.Bernard » 1912 et porte le cachet du fondeur A.A.HEBRARD / PERDUE, Paris, Musée d’Orsay, n° inv. RF 3161 ;
– Joseph Bernard, Porteuse d’eau, bronze, signé et porte le cachet Cire Perdue / A.A Hébrard et le n° 22, Chicago, The Art Institute, n° inv.1943.1189.

Réalisée par Joseph Bernard, cette sculpture en bronze représentant une jeune femme à la nudité sensuelle et gracieuse portant une cruche dans une position de charmante instabilité est sans aucun doute l’œuvre la plus iconique de cet artiste qui a tout le long de sa carrière été sensible à la beauté féminine et à la recherche de simplification des formes. Le modèle original en plâtre accueillant les visiteurs dans la salle dédiée à l’Exposition de 1925 de la belle présentation « Le Paris de la Modernité » qui se tenait à l’hiver 2024 au Petit Palais à Paris, rappelle le vif engouement qu’a procuré cette idole féminine au corps lisse et à la silhouette balancée dès les années suivant sa création. L’œuvre que le peintre Jacques-Emile Blanche décrivait comme « un cri de curiosité, d’étonnement et d’admiration » semble avoir connu une première version avec le bras gauche tendu dans les années 1905/1907, période durant laquelle la beauté féminine et le mouvement occupent intensément le sculpteur. Une seconde version est finalisée en 1910. Haute de 184 cm, elle est présentée au Salon d’Automne de 1912 où la critique succombe à son charme et admire la modernité de son caractère synthétique : « …Vingt-trois belles silhouettes simplifiées d’abord par la pénombre, s’affirment bientôt. L’impression première rappelle la statuaire hindoue si extraordinaire de vie. Il s’y superpose un souvenir des marbres éginétiques et des rocs sculptés que Bacchus en sa course asiatique, essaima jusqu’aux grottes des actuels Lolos. Ce n’est qu’à l’étude que le détail indique la personnalité de l’artiste : Une jeune fille nue revient de la fontaine ; faible mais souple, elle porte la cruche d’eau puisée ; Ô l’agréable joliesse, la paix heureuse, la beauté fine ! » (La Plume, 1 novembre 1912, p. 9/20). Un exemplaire est fondu en bronze avant 1914 et est acquis par l’État en 1917 pour le musée du Luxembourg : l’artiste entre alors au Panthéon des artistes vivants.
Le sujet est ensuite présenté dans sa taille originale ou à l’état petite nature, en plâtre ou en bronze, à toutes les expositions importantes tant internationales que rétrospectives où l’artiste fut représenté. Pour n’en citer que quelques-unes : l’Armory Show de New York de 1913, la Galerie des Arts en 1914, le Pavillon du Collectionneur de 1925 jusqu’au sa grande rétrospective de 1932 au musée de l’Orangerie, et, dernière en date, Le Paris de la Modernité au Petit Palais, en 2024. Le sculpteur, qui connaissait à l’instar de nombreux artistes, des difficultés matérielles, a bénéficié, grâce à une réputation durement acquise, de l’attention du grand dénicheur de talent et fondateur d’une fonderie de grande renommée depuis 1902, Adrien-Aurélien Hébrard. Cet homme avisé et visionnaire passe alors un contrat d’édition en 1908 avec l’artiste pour des pièces de petites dimensions et lui consacre sa première exposition personnelle dans sa Galerie du 8 rue Royale, entre le 4 et 23 mai 1908. Une édition de 50 exemplaires de la Jeune fille à la cruche, dans sa version réduite de 54 cm est contractuellement définie avec Hébrard, mais finalement seulement tirée en 36 exemplaires jusqu’en 1934. Notre bronze porte le n°24. Le matériau sublime l’aspect lisse et polie de la peau de la jeune femme sur laquelle des jeux subtils de lumière exacerbent la vibrance du mouvement et la modernité de ses formes épurées.

05 juin 2024 Audap & Associés Hôtel Drouot, salle 6
Voir le diaporama